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Photo du rédacteurMaison des écrivains et de la littérature

Sylvie Gouttebaron : « Il faudrait être franchement inconscient ou cynique pour ne pas considérer la cause écologique comme essentielle, prioritaire même, au présent comme à l’avenir »

Dernière mise à jour : 5 mars


Doline de Zajercé en Istrie (c) Marinette Faerber

Dans le cadre de son dossier écopoétique de la semaine, et dans la rubrique « Observatoire » en partenariat avec la Maison des écrivains et de la littérature, Collateral revient en compagnie de Sylvie Gouttebaron sur l’initiative des ateliers littéraires avec le vivant : Par nature. En effet, la Maison des écrivains et de la littérature propose depuis cette année un nouveau programme national d’éducation artistique et culturelle mobilisant 100 auteurs et 100 établissements autour d’ateliers littéraires intitulés Par nature, des ateliers littéraires avec le vivant. Dans la lignée du travail accompli par la Mél depuis plusieurs années afin de sensibiliser les élèves à la protection de l’environnement par la voix de la littérature, ce programme permet la rencontre des élèves avec un artiste et entend favoriser la pratique de l’écriture et de la lecture à l’occasion d’une série de 4 ateliers de travail, pour des classes de la 6e à la Terminale. Retour avec Sylvie Gouttebaron, le temps d’un entretien, sur la visée écopoétique de cette démarche, prélude à une série d’entretiens menés avec des autrices et des auteurs tout au long de la semaine dans Collateral par la directrice de la Maison des écrivains.

 

 

Comment est né le souhait de la Maison des écrivains et de la littérature de proposer les ateliers "Par Nature" qui se présentent d'emblée comme des ateliers littéraires avec le vivant ?

 

C’est en 2015 et parce que la France accueillait la COP 21 que la Maison des écrivains a commencé à agir, en littérature, pour la protection de l’environnement, en participant, à sa façon, à l’éveil des consciences quant à cet enjeu majeur. Le Parlement sensible, tel fut le nom donné à cette première action portée par 31 autrices/auteurs auxquels avait été commandé un « discours ». Ces discours auraient dû être prononcés à l’Assemblée nationale, dont les portes nous avaient été ouvertes, le 14 novembre 2015, journée marquée à jamais par les attentats qui eurent alors lieu. Quelques mois plus tard, les textes furent lus par leurs auteurs au théâtre du Vieux-Colombier et un livre paru chez Artaud permit à beaucoup de découvrir cet engagement. Dès après ces lectures, des rencontres eurent lieu dans des classes pour transmettre quelque chose de cette aventure. Les premiers « ateliers » étaient nés, portant sur ce motif. Il restait à les développer sur le long terme, préférant le développement durable à l’événementiel comme le fait toujours la Maison des écrivains. L’un accompagnant l’autre et le prolongeant à l’envi.

 

 

En quoi s'agit-il de mettre en évidence, par la voix des écrivaines et des écrivains, un véritable souci de protection de l'environnement ?

 

Eh bien, c’est comme si l’on revenait à l’essentiel, en donnant du temps au temps de l’observation des choses environnantes de la nature. Les écrire le plus précisément possible, c’est d’abord les nommer justement, les décrire avec insistance pour en faire autre chose qu’une substance inerte à côté de quoi l’on passe sans y porter attention. C’est la raison pour laquelle le recours au savoir scientifique est, dans ce contexte, extrêmement précieux. Et pour les écrivains, et pour les élèves, mais je dirais même, dans le cadre du partenariat, en Île-de-France, avec le Muséum d’histoire naturelle, également pour les scientifiques complices.  Les thèmes abordés au cours de chaque atelier embrassent toutes les problématiques possibles, de la fonte des glaciers à la disparition des abeilles, en passant par l’exploitation de ressources pourtant limitées, ou encore la surconsommation.

 

 

Comment ces ateliers prennent-ils concrètement forme dans les établissements scolaires ?

 

À destination d’une classe de la 6e à la Terminale, il s’agit d’une série de 4 ateliers de 2 heures. La première de ces interventions permet à l’auteur de se présenter et d’évoquer son propre rapport à la nature. Les 3 ateliers suivants sont consacrés à la pratique des élèves en fonction du choix privilégié par l’auteur/autrice (en accord avec l’enseignant) de travailler l’écriture et/ou la lecture, qu’il s’agisse de prose, de poésie, de théâtre… Le rendu peut être un texte collectif, un recueil de texte, une lecture polyphonique. 

Ces ateliers peuvent donner lieu à des travaux interdisciplinaires (SVT, Art plastique…) et/ou peuvent également offrir l’opportunité d’une visite sur un site nature ou dans une librairie où l’auteur présentera les livres - du patrimoine ou contemporains qui importent dans le contexte de ces ateliers -, à l’initiative du (de la) professeur(e).

Exemple de thématiques abordées : la forêt, l’arbre et ses feuilles, la biodiversité, l’eau, la mer, les nuages…

 

 

S'agit-il pour vous aussi d'un projet politique de sensibilisation à l'écologie ? 

 

Oui, bien sûr. En donnant toute sa place à la littérature, dans sa puissance imaginative, en faisant en sorte qu’elle soit ici une alliée pour exprimer non pas seulement ce qui ne va pas, mais pour envisager autrement l’avenir, ne pas se laisser entraîner dans une spirale infernale. L’éco-anxiété est très présente chez les jeunes élèves, les enseignants nous le disent. La littérature, par la présence des auteurs/autrices, leur permet de dire, par l’art, ce qui fonde leur rapport à la nature, au « vivant ». Ainsi peuvent-ils espérer trouver les chemins qui les mèneront quelque part, en déterminant eux-mêmes les lignes à emprunter, par goût, passion, engagement. Les discours, quelle qu’en ait été leur forme, était à l’origine de notre projet, très politiques puisque devant être prononcés à l’assemblée nationale. C’est dans la même perspective que s’inscrivent ces ateliers : convaincre en partageant le souci que l’on doit avoir pour l’avenir de la planète, la survie des espèces. Il faudrait être franchement inconscient ou cynique pour ne pas considérer cette cause comme essentielle, prioritaire même, au présent comme à l’avenir.


(Propos recueillis par Johan Faerber)


Plus de renseignements sur ces ateliers ici

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