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Photo du rédacteurJean-Marc Pontier

Mariotti croque l’avenir (Le Génie des élèves)


Mariotti (c) les enfants rouges


Depuis qu’elle a créé sa maison d’édition Les Enfants rouges en 2006, Nathalie Meulemans s’est consacrée à la publication de romans graphiques. Le Génie des élèves, d’Olivier Mariotti, échappe cependant à cette classification : pas de séquentialité narrative, pas de fiction. Le dessinateur et professeur d’Arts plastiques propose une suite de portraits d’élèves tracés au feutre noir et à main levée dans le cadre d’une contrainte temporelle (sept minutes environ par croquis) et spatiale (la salle d’Arts plastiques pendant la récré).


Chaque portrait, imprimé sur la page de gauche, est accompagné de cinq questions, toujours les mêmes : l’amour, l’école, la mode, l’art et les réseaux sociaux, autant de sujets impliquant les jeunes et auxquels, de la 6e à la terminale (l’artiste- enseignant exerce en collège et en lycée), ils répondent avec une désarmante spontanéité. L’Amour selon Phoebe ? « Inconditionnel et puissant ». L’école, pour Lola ? « C’est le lieu où on grandit au ralenti ». La mode d’après Yannick ? « Une chose dont on aura honte plus tard ».


Et le scalpel d’Olivier Mariotti traduit avec finesse et efficacité ce regard lucide et poétique des jeunes sur les questions sociétales. Dans cette œuvre qui peut se lire dans tous les sens, le trait est fin et délié, d’un classicisme épuré, qui va à l’essentiel à l’instar des élèves qui répondent sans ambages aux questions posées. L’entourage plastique est gommé, le dessinateur se concentre sur le visage, la chevelure dont les noires ondulations sont magnifiées par le travail du feutre. Avec leurs tee-shirts ou leurs hauts de jogging floqués de marques, ils portent tous des gueules d’avenir. Mariotti nous rappelle que la jeunesse est un objet d’étude sans cesse en mouvement. Il réussit sans complaisance mais avec, on le sens, beaucoup de bienveillance, à nous proposer un précipité d’élèves : un moment de leur vie où la pose est aussi éphémère que la fiabilité de leurs réponses.


Il fallait certainement établir une vraie relation de confiance pour que l’élève se livre ainsi au regard scrutateur de l’artiste. Olivier Mariotti le souligne justement en quatrième de couverture : « La véritable grandeur des élèves vient toujours de leur esprit. Il suffit de les écouter avec un feutre comme micro ». Au total, Mariotti c’est Ingres qui rencontre Meirieu.






Olivier Mariotti, Le Génie des élèves, ed. Les Enfants rouges, 2024, 4 tomes : Printemps/été/ automne, hiver à paraître en 2025), 10 euros.

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