Cette fois, le chevalet de Siryne Zoughlami s'est posé dans l’exposition « Berthe Morisot et l’art du 18e siècle » qui vient de s’achever au musée Marmottan Monet en ce début mars 2024. Cette troisième expertise naïve présente au premier plan un éventail ouvert. La composition du décor de cet accessoire que chérissait Berthe Morisot, reprend, comme sur le projet d'éventail qu'elle avait elle-même dessiné, celui des deux éventails du 18e siècle qu'elle possédait et qui sont exposés à l'entrée de l'exposition. Ce goût de l’éventail n’échappa pas à Manet dans ses portraits de la peintre et fit signe à Mallarmé, grand spécialiste des éventails, qui écrivit en 1896 la préface à l’exposition posthume des peintures de Morisot chez Durand-Ruel.
Les médaillons sur les côtés attestent de l'intérêt de la peintre pour le motif des personnages représentés de dos, qu'elle emprunte à Watteau ou encore à Boucher qui inspire ici la scène centrale avec la copie par Morisot d'un détail de son « Apollon révélant sa divinité à la bergère Issé » .
Un éventail enfin dominé par les tonalités vertes, couleur prégnante des tableaux de Morisot, notamment ses portraits de femmes s'inspirant pour peindre les ombres sur les chairs, des pastels de Perronneau.
Derrière l'éventail, la figure d’une belle endormie, un tableau qui clôt presque l’exposition : comme Morisot, elle est la femme à nu derrière sa peinture.
Comment ainsi ne pas souscrire à ce que disait d'elle Renoir : « Et quelle autre anomalie de voir apparaître dans notre âge de réalisme, un peintre si imprégné de la grâce et de la finesse du XVIIIème, en un mot, le dernier artiste élégant et « féminin » que l'on ait eu depuis Fragonard sans compter ce quelque chose de « virginal » que Mme Morisot avait à un si haut degré dans sa peinture » ?
Exposition « Berthe Morisot et l’art du 18e siècle : Watteau, Boucher, Fragonard, Perronneau » du 18 octobre 2023 au 3 mars 2024
Musée Marmottan Monet
2, rue Louis-Boilly, 75016 Paris